À l’occasion de la sortie de son nouvel album Moda ce vendredi 21 juin, nous sommes allés à la rencontre de Kazy Lambist, auteur-compositeur et interprète français, qui s’est construit une solide réputation et une fan base internationale depuis ses débuts en 2015. Après un premier album en 2018, 33 000 FT., l’artiste de 32 ans revient pour nous livrer un album marqué de son style électro-pop avec des influences méditerranéennes prises à la volée de ses voyages.

 

 

Quelles ont été les inspirations musicales de l’album ?

Mes inspirations ont été formulées au fil des voyages et des rencontres. J’ai habité deux ans en Italie, à Rome, j’ai passé quelques mois en Turquie… C’est pour cela que les couleurs et les ambiances des morceaux sont assez diverses. J’ai, par exemple, utilisé des instruments locaux, c’est le cas dans Dünya où un violoniste traditionnel turc apporte sa touche au morceau.

 

« (…) j’aime faire des feats, car je pense un peu comme un producteur, je crois. Il y a des voix que j’ai envie de mettre en avant et je compose pour elle. C’est aussi un moyen pour moi de m’engager à la composition d’un morceau, je perds étrangement la motivation quand je compose seul, avoir quelqu’un avec qui travailler me motive davantage. »

 

C’est pour cela qu’il y a autant de featurings ?

Oui, absolument. Mes featurings se sont faits au fil des rencontres aussi. Et puis j’aime faire des feats, car je pense un peu comme un producteur, je crois. Il y a des voix que j’ai envie de mettre en avant et je compose pour elle. C’est aussi un moyen pour moi de m’engager à la composition d’un morceau, je perds étrangement la motivation quand je compose seul, avoir quelqu’un avec qui travailler me motive davantage. Et puis une rencontre en entraîne une autre. Par exemple, je voulais absolument travailler avec Sedef Sebüktekin, une chanteuse turque que j’aime beaucoup, et elle connaissait un super violoniste alors on l’a intégré aussi. Il ne parlait pas un mot d’anglais, ni de français, il fallait tout traduire, c’était une drôle de situation (rire) !

 

Dans une vidéo pour les réseaux sociaux, on voit les coulisses de la composition d’un morceau, comment s’est passée la composition de cet album ?

C’est drôle, parce que ces vidéos ne sont pas forcément de mon initiative. On me dit beaucoup que c’est ça que les gens attendent en ce moment, et ça me fascine comme les nouvelles générations sont presque plus intéressées par la manière dont les choses sont faites que par les choses elles même parfois. Avant, il y avait une part de mystère autour des œuvres, j’aimais bien ça personnellement. Mais pour en revenir à la question, la plupart du temps, je compose le morceau seul et ensuite les artistes avec qui je collabore viennent ajouter leur touche, même si ça a pu arriver de composer directement ensemble. Par exemple, pour le morceau Flawless Form dans lequel je collabore avec Emile Londonien, j’avais préparé une maquette, mais comme nous n’avions qu’un seul jour de studio pour faire le morceau, les choses ont pris un autre tournant et le rendu final n’a plus grand-chose à voir avec la maquette originale (rire).

 

Dans ce morceau où tu es en feat avec le groupe Emile Londonien, on sent une influence jazz mélangée à de la house et de l’électro, c’est un genre pourtant assez hermétique habituellement…

C’est vrai, le jazz fait partie, avec la musique classique, de ces genres musicaux avec des codes qui s’adressent à des initiés. Tandis que la pop a plus pour but de s’adresser au plus grand nombre. Mais il y a des artistes qui essayent de faire des ponts entre ces deux univers, c’est le cas d’Emile Londonien, je crois. Et puis, ils font aussi en fonction de ce qu’ils aiment eux même et puisqu’ils apprécient aussi bien le jazz que la house, la fête et l’effervescence qui va avec, la combinaison s’est faite naturellement. D’une manière générale, j’ai beaucoup écouté de jazz dans mon enfance, c’est un genre musical qui m’a beaucoup inspiré, j’avais un groupe de jazz à l’adolescence (rire).

 

Quelles ont été tes inspirations esthétiques pour l’album ? On remarque notamment des références à la peinture italienne sur la pochette.

Oui, tout à fait ! Moi qui ne m’y connaissais pas beaucoup en peinture avant, j’y ai vraiment été introduit lors de mon séjour en Italie. La peinture a une place particulièrement importante à Rome. La pochette reprend les motifs des futuristes comme Carlo Carrà, ou encore du néo baroque Giorgio De Chirico. On a voulu mélanger ces esthétiques inspirées de l’architecture italienne avec des références plus pop, comme la serviette de plage que je porte comme une toge. Et au loin, on voit la Méditerranée, parce qu’elle est au cœur de cet album. De la Turquie à l’Italie, en passant par la Grèce, c’est sûrement la Méditerranée qui est ma plus grosse inspiration finalement.

 

 

On peut donc considérer que c’est un album d’été ?

Ah oui absolument ! Et ça tombe bien, il sort le 21 juin (rire) !

 

Dans Interlude, le morceau débute avec la voix de Fotini Peluso, une actrice italienne, qui récite un texte en italien. On sent un pas vers le cinéma, était-ce une envie de raconter une histoire ?

Je ne sais pas si c’était une envie de raconter une histoire, mais il y a une influence du cinéma, c’est certain. De même que pour la peinture, j’ai été introduit au cinéma italien en étant à Rome. J’aime beaucoup la nouvelle vague italienne, les cinéastes de l’âge d’or des années 50/60 aussi. Le texte du début est un poème de Pasolini, il est connu en tant que cinéaste, mais je me suis intéressé à son travail de poète. Le poème parle de la Méditerranée, de prendre le temps, ce sont des choses dont je voulais parler dans l’album. L’actrice qui récite le poème, Fotini Peluso, est italienne et grecque, elle incarnait parfaitement cet esprit méditerranéen à mon sens.

 

Le titre de l’album Moda, signifie mode en italien, est ce que tu as un intérêt particulier pour la mode ?

Alors c’est surtout un quartier d’artistes à Istanbul, mais c’est aussi un clin d’œil à la mode en italien et aux modes musicaux. C’est la polysémie du mot qui m’a intéressé, j’ai trouvé qu’il incarnait plein de choses de l’album encore une fois. Au-delà de ça, oui, la mode m’intéresse, il y a des marques que j’affectionne particulièrement. Par exemple, la marque INDRESS avec qui j’ai collaboré récemment. J’aime bien leurs pièces simples, bien coupées, intemporelles.

 

En parlant d’intemporalité, certains artistes regrettent la consommation rapide des albums et des morceaux qui sortent. En tant qu’artiste, est ce qu’on ressent une pression à devoir produire plus vite pour toujours rester dans la tendance ?

Non, je crois que je n’ai pas trop cette pression, parce que justement, j’essaye de faire une musique intemporelle. Je crois que tout dépend du style musical, si on fait une musique très actuelle, tendance, on est soumis à ces modes passagères et il faut suivre le rythme et se renouveler tout le temps. Tandis que moi, j’essaye de m’en tenir à mon style personnel et d’enlever tous les éléments que je trouve inutiles, dont les gens pourraient se lasser très vite. C’est vrai que l’accessibilité à la musique a rendu un peu automatique la consommation des morceaux. Avant, on prenait le temps d’aller à un concert pour écouter la musique d’un artiste, c’était un événement. La télé avait déjà changé l’accessibilité, mais maintenant avec les plateformes, c’est encore plus poussé. Et en même temps, cette démocratisation est géniale, car je fais moi-même parti de ces artistes à qui cela a profité. Il y a du bon comme du mauvais. C’est pour ça que je vise l’intemporel, pour que les gens ne se lassent pas. Et j’ai l’impression que ça marche, parce que mes anciens morceaux sont les plus écoutés à l’heure actuelle.

 

Moda est disponible via Cinq 7/Wagram Music

Texte Anouk Ait Ouadda